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Ainsi soit il
21 août 2012

Mercredi 6 juin

Je sais pas quel age elle a. Je l'imagine bien, ce matin, toute fripée de sommeil ouvrir les yeux et se dire, comme ça: Ouais je sais bien, c'est mon anniversaire, pas la peine d'y penser. Et trainer ses rides jusqu'à la cuisine et boire son café avec des bruits horribles en se disant qu'elle a bien vieilli et s'imaginant la petite Valérie d'antant, avant que les années passent, qui se précipitait dans le jour en courrant. Elle a du revoir la joie qui lui tordait la bouche et les yeux et qui s'en est allé très loin. Elle est triste, ma mère. J'aimerais bien savoir ce qu'elle a dans la tête et le sang qui gonfle ses cris et la vie qui lui arrache les paupières à l'heure du levé. Et à quoi elle rêve aussi. Putain j'aimerais vraiment savoir, comme ils sont ses pays secrets et les couleurs qui embrasent ses yeux, si c'est les mêmes qu'elle étale sur le visage de ses dames. Comment c'est, de peindre, de vivre mille fois les mêmes minutes, les mêmes semaines qui repassent, les mêmes sourirs et cette même crainte qui chaque fois vient et les étrangle. Lorsque tout devient tragique, que tout tombe sur son visage, comme une pluie qui ne doit jamais mourir et qui asperge ses yeux comme des caniveaux. Je ne reconnais pas son visage, je ne le reconnais jamais. Je crois que je ne l'ai jamais vu, vraiment, derrière les rides et les marécages. Chacun de ses gestes à quelque chose de terrible, quelque chose de tellement triste qu'on ne peut que détourner le regard. On a honte de n'être que ça, de n'être que des soupirs et des caresses et des muscles si faibles qu'il ne peuvent porter le corps d'un autre. C'est lourd son corps, c'est tellement lourd, ca se porte pas, ça s'abandonne hors de soi, dans ses paroles et dans ses rires.

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